Engagement environnemental et social, Technologie produit
Circular, notre nouveau programme de vêtements recyclés
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Notre principale motivation en tant que marque textile engagée est de rendre l’industrie textile moins polluante, plus durable et plus sobre. Il y a de multiples points d’amélioration, mais 3 thématiques sortent clairement du lot :
- Produire moins, consommer moins, faire durer et réparer les vêtements
- Sortir de la dépendance au charbon et gaz pour la production d’électricité alimentant les machines de filature, tissage, teinture
- Sortir du pétrole en ce qui concerne les matières.
Nous avons déjà rédigé cet article qui propose un grand résumé des 2 premiers points.
Par rapport au pétrole et aux matières, nous allons en parler ici !
Commençons d’abord par rappeler que pour garder une chance de limiter la hausse des températures sous +1,5 °C, il faudrait laisser dans le sol près de 60 % des réserves de pétrole. De plus, le pétrole est en quantité finie dans les sols. À production constante et selon les réserves connues, il en resterait encore pour une cinquantaine d’années. Plus on en extrait, plus nous nous éloignons de nos objectifs climatiques. Plus on en est dépendants, plus son sevrage sera subi. Super !
Le polyester est de loin la matière la plus fabriquée dans l’industrie textile, avec 55% du volume total de production, suivi du coton (25%) puis d’autres fibres synthétiques ou cellulosiques (polyamide, acrylique, laine, etc.). La production mondiale de polyester a doublé entre 2000 et 2020, ce qui pose aussi beaucoup de questions.
Dans sa version conventionnelle, le polyester est directement issu du pétrole. Heureusement, il y a d’autres manières de faire, dont certaines que nous connaissons bien :
- Recycler des bouteilles plastiques en PET, du grand classique chez nous depuis 2009 avec nos partenaires Taiwanais. A l’échelle mondiale, seulement 15% du polyester utilisé est du polyester recyclé.
- Utiliser du bio-polyester partiellement issu du sucre, après raffinage et fermentation. Nous l’avons utilisé ces dernières années pour nos produits techniques mais nous en sortons pour le remplacer par une alternative qui nous paraît plus satisfaisante : le polyester « circulaire », partiellement issu de vêtements usagers.
Bio-polyester: pourquoi l’abandonner ?
Le bio-polyester est une solution intéressante, nous en parlions dans cet article, mais nous avons identifié trop de limites pour continuer l’aventure :
- Le sucre que nous utilisions était un « déchet », sous-produit de la culture de la canne à sucre. Il est évident que cet approvisionnement aurait été insuffisant si demain toutes les marques décidaient de s’y mettre. Quel risque de conflit d’usage des sols ? Déforestation ?
- La dépendance directe au pétrole reste assez forte, seulement 30% de la formule chimique du bio-polyester est issue du sucre. Si ça vous parle, il n’y avait que le mono éthylène glycol que nous arrivions à bio-sourcer.
- Nos calculs d’intensité carbone pour 1kg de granulé polyester, réalisés avec le cabinet Quantis, montraient finalement peu de différence entre le polyester conventionnel et le bio-sourcé.
- Le prix de cette fibre était élevé et rognait nos marges.
Bref, pour toutes ces raisons, nous avons stoppé notre utilisation du polyester bio-sourcé.
Nouvelle option : le polyester “circulaire”.
Il s’agit de collecter puis de recycler des vêtements usagés (toutes marques confondues) composés à 100% de polyester. Les chutes de tissus ayant lieu pendant la fabrication des vêtements sont aussi mobilisées pour aboutir à un stock significatif. Ainsi, la composition moyenne d’une fibre circulaire est : 60% chutes de tissus / 40% vêtements usagers.
Ces deux gisements se trouvent en Chine, la société Jiaren s’occupe de tout. Ensuite, la chaine d’approvisionnement Picture prend le relais (filature, tissage, teinture, assemblage) avec nos partenaires habituels.
Voici une petite FAQ afin de répondre à toutes les questions que vous pourriez vous poser à ce stade :
1/ Pourquoi ne pas recycler les vêtements Picture ?
Le recyclage d’un vêtement doit être perçu comme la dernière des étapes finales. Avant cela, il doit être porté, porté encore, réparé, puis porté à nouveau. Puis il peut être donné, vendu en seconde main, réemployé, etc. Le vêtement n’est pas une bouteille plastique à usage unique. La priorité n’est donc pas de collecter des vêtements pour garantir un nouveau stock de production, mais plutôt de faire durer ceux que nous avons déjà. Aussi, nos vêtements sont vendus un peu partout en Europe et Amérique du Nord, le gisement est donc très éparpillé, difficile à collecter et les volumes que nous pourrions récupérer resteraient faibles au regard des besoins de production.
À date, il s’agit donc d’une collecte de vêtements usagés en Chine.
2/ Pourquoi ne pas collaborer avec d’autres marques pour organiser une collecte groupée ?
C’est une option effectivement. Mais comme nous le disions, notre priorité est la durabilité des vêtements. C’est pourquoi nous déployons plus d’efforts sur d’autres sujets, comme par exemple notre garantie de réparabilité à vie ou le collectif En Mode Climat.
Ainsi, nous sommes heureux de voir que les solutions de recyclage émergent et qu’elles vont permettre à l’économie circulaire de passer un cap. En revanche, faciliter le recyclage ne doit pas servir uniquement à entretenir une machine de production qui ne se remet pas en question.
3/ Pourquoi le recyclage a lieu en Chine et pas en Europe ?
La collecte de vêtement usagés est en Chine car la technologie de recyclage de l’entreprise Jiaren est aussi opérationnelle là-bas. Comme notre chaine d’approvisionnement (filature, tissage, teinture, etc.) pour les produits techniques est historiquement située à Taiwan et en Chine, la connexion fut grandement facilitée. En Europe, des technologies plus ou moins similaires émergent mais nous n’avons jamais vraiment exploré ces possibilités, sauf avec l’entreprise Carbios qui est très prometteuse… et très proche de chez nous à Clermont-Ferrand !
4/ Comment ce processus de recyclage fonctionne-t-il ?
Bon, nous ne sommes pas chimistes mais voici quelques détails ! Il s’agit de dépolymériser le polyester pour revenir au niveau moléculaire, sans aucune impureté. Cela permet d’isoler d’un côté le mono éthylène de glycol, et de l’autre l’acide téréphtalique, les 2 composants originaux du polyester. D’autres étapes sont nécessaires (pré-traitement, filtration, stockage, etc.) pour en arriver là. Puis, il y a re-polymérisation afin d’obtenir des granulés de polyester.
5/ Les émissions de CO2 de ce procédé sont-elles plus faibles que celles des autres alternatives (conventionnel, bio-sourcé, recyclé) ?
Il y a 3 ans, nous avions demandé au cabinet Quantis de calculer les émissions de CO2 pour 1 kilo de différents types de granulés polyester, avant filature, en Chine. Le pays d’étude est important car les mix-électriques des pays influencent beaucoup le résultat.
Puis nous avons croisé ces infos avec les résultats de Jiaren pour 1kg de granulés de polyester circulaire.
Résultats :
- Polyester conventionnel : 3,13 kg CO2
- Bio-polyester : 2,77 kg CO2
- Polyester recyclé issu de bouteilles plastiques : 1,20 kg CO2
- Polyester circulaire : entre 1,08 et 1,45 kg CO2
Pour l’ensemble de nos produits en polyester, nous sommes donc désormais positionnés sur ce qui semble être les 2 meilleures options à disposition. Ainsi, aujourd’hui, 80% de nos pièces techniques intègrent le polyester circulaire.
Rappelons quand même que la bataille de la comptabilité carbone ne doit pas masquer d’autres angles de vue: sobriété, durabilité, origine des matières, etc. Ainsi, 1 veste en polyester conventionnel vaut mieux que 3 vestes en polyester recyclé, et il est préférable de recycler des vêtements qui ont duré plutôt qu’une bouteille plastique utilisée une seule fois.
6/ La qualité est-elle au rendez-vous par rapport au polyester conventionnel ?
Oui, rien ne change. Les granulés de polyester, qu’ils soient conventionnels, recyclés ou circulaires sont chimiquement identiques. A ce stade, le fil n’est même pas encore fabriqué ! D’un point de vue qualité et durabilité, tout se jouera donc sur les étapes suivantes : filature, tissage, teinture, assemblage, choix du traitement déperlant, de la membrane, etc. Côté Picture, nos standards de qualité sont donc les mêmes qu’avant. Idem pour l’aspect réparabilité.
7/ Quelles sont les certifications ?